Google a développé un système et noué des partenariats
afin de savoir si la publicité en ligne provoque un achat en magasin.
Pour cela, l'entreprise américaine exploite certaines données de cartes
bancaires. Un dispositif qui soulève des interrogations.
Ce n’est un mystère pour personne,
Google vit quasi-exclusivement de la publicité.
Le reste de la structure du chiffre d’affaires (à peine 12 %) de sa
maison-mère, Alphabet, provient des revenus liés à Google Play, à
Android, à certains smartphones ainsi qu’à quelques paris qui essaient
de transformer des investissements en projets rentables, qu’il s’agisse
de Calico, Verily, Nest ou encore Waymo.
Et grâce à la publicité, Google va très bien. «
Nos excellents
résultats représentent un incroyable départ pour 2017, avec un chiffre
d’affaires en hausse de 22 % par rapport au premier trimestre de 2016 et
24 % en devises constantes », commentait le groupe ce printemps, avec un
revenu ayant atteint 24,75 milliards de dollars rien que pour le premier trimestre.
Il faut dire que Google a trouvé un modèle économique très lucratif :
le marchandage des données personnelles. Ses services sont gratuits sur
Internet parce qu’il
se rémunère (
il n’est pas le seul)
via les informations que les visiteurs laissent sans y prendre garde —
les conditions générales d’utilisation lors de l’inscription annoncent
pourtant la couleur, mais personne ne les lit vraiment.
Le groupe américain, qui engrange déjà des dizaines de milliards de
dollars avec son dispositif tentaculaire, entend aller encore plus loin
aujourd’hui. Dans un article publié sur
Inside AdWords, la
firme de Mountain View détaille son idée : il s’agit de savoir dans
quelle mesure une publicité affichée sur le net auprès d’un internaute
se traduit par un acte d’achat dans une boutique ayant pignon sur rue.
Lier la publicité en ligne avec les achats dans les magasins
On le devine, le dispositif de Google mêle tout à la fois la
publicité affichée en ligne, les données personnelles des internautes,
leur pistage sur le web ainsi que certaines informations auxquelles des
tiers ont accès lorsque des achats par carte bancaire sont effectués.
Tout ceci est croisé dans un mécanisme opaque mais dont la compagnie
assure qu’elle respecte la vie privée des usagers.
Selon le
Washington Post, «
les
cadres de Google disent qu’ils emploient des formules mathématiques
complexes et en cours de brevetage pour protéger la vie privée des
utilisateurs lorsqu’ils trouvent une correspondance entre un utilisateur
Google et un consommateur qui vient de faire un achat dans une boutique
physique ».
«
Les formules mathématiques convertissent les noms des
particuliers et d’autres données d’achat, incluant l’horodatage, la
géolocalisation et le montant de l’achat, en des chaînes de nombres
anonymes », continue le journal. «
Les formules empêchent
Google de savoir l’identité des clients et pour les commerçants qu’ils
font face à des utilisateurs Google », est-il encore indiqué.
Le quotidien indique que ce dispositif est un processus de
chiffrement en double aveugle. Google ne sait pas quels sont les
produits qui ont été achetés, mais simplement que des correspondances
ont pu être faites. Les partenaires tiers de Google peuvent suivre près
de 70 % des transactions par carte bancaire aux USA. En clair, il y a
plus de deux chances sur trois d’être repéré.
Grâce à ce dispositif, Google peut obtenir des informations autrement plus précises que la
simple géolocalisation d’un utilisateur
entrant dans une boutique. En effet, cette donnée ne permet pas de dire
si un achat a été fait ou non — on peut très bien entrer à l’intérieur
d’un magasin sans rien dépenser –, alors qu’une information sur une
transaction bancaire est autrement plus précieuse.
Vendre plus de publicités, mais à quel prix ?
Avec cette indication, Google est susceptible de
vendre davantage de publicités,
à des prix éventuellement différents. Pour les commerçants, savoir le
rapport entre une campagne de pub et l’acte d’achat est aussi très
intéressant, car elle permet de définir une politique d’annonce :
faut-il acheter davantage d’espaces publicitaires ? À quel moment ? Pour
quel public ? Combien de temps ?
Reste la question de la sécurité et de la confidentialité de ce nouveau dispositif, qui a de quoi légitimement inquiéter.
Si Google dit avoir pris des tas de mesures pour rendre anonyme la
correspondance entre un client et un usager Google, un processus dont
l’irréversibilité reste à prouver, il s’avère qu’il peut être assez
facile de retrouver l’identité d’une personne
à partir de données de carte bancaire,
selon des travaux effectués au MIT. Et l’on ne parle évidemment pas du
risque, incertain mais dont il faut tenir compte, du risque de piratage.
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