PARIS - Bijoux géolocalisés, détecteurs de voleurs de cuivre, drones en ville... les entreprises en démarrage et les groupes industriels sont lancés dans une «course technologique» contre des délinquants qui ont toujours une longueur d'avance, s'accordent à dire des experts.
La dernière trouvaille d'Évolution, l'entreprise de six salariés en Haute-Savoie (Alpes françaises), est une
montre-espion à la James Bond: malgré son aspect luxueux, volontairement ostentatoire, la montre qui abrite une puce GPS miniature finira comme mouchard sur le présentoir d'une bijouterie.
«Lors d'un braquage, dans l'urgence, les voleurs emportent souvent le présentoir et les policiers pourront alors les repérer avec une précision d'un ou deux mètres», explique Fabrice Foschia, le patron de la société, qui espère développer un jour des bijoux équipés de GPS.
Mais la joaillerie n'est pas le seul débouché du mouchard: des GPS miniatures peuvent aussi être installés en toute discrétion sur des oeuvres d'art ou sur les voitures de suspects.
«La tendance est à la traçabilité de la délinquance et à une plus grande automatisation de la surveillance», affirme Jean-Luc Logel, président d'Eden, le tout premier groupement européen d'entreprises innovantes de la sécurité et la défense, qui réunit 100 membres et emploie 7500 personnes.
La lutte contre la délinquance du quotidien, celle des rapines ou des intrusions, passe par des systèmes de détection humaine par imagerie thermique ou infra-rouge dans des espaces à ciel ouvert comme ceux qui stockent des matériaux en cuivre (sites SNCF - Société nationale des chemins de fer français - entrepôt de matériaux) mais aussi les sites sensibles tels que les centrales nucléaires.
«Nos contrats de surveillance périmétrique ont augmenté de 10% depuis les actions de militants écologistes qui se sont introduits dans des centrales nucléaires», ces derniers mois, affirme Yves Monneret, président du conseil de surveillance de Sorhea, 50 salariés à Vaulx-en-Velin, près de Lyon (centre-est).
Au côté de ces PME qui élaborent des solutions pour des besoins ciblés, des géants industriels déploient des programmes pour sécuriser des grands événements tels que les Jeux olympiques ou des espaces publics.
Les trafiquants de drogue, pros de l'écoute
À Mexico, le groupe de défense Thalès a intégré en 2010 un système de surveillance tentaculaire avec 10 000 caméras associées à des drones de surveillance, des détecteurs de coups de feu ou de mouvement de foule, mais aussi des boutons de «panique» permettant aux citoyens d'alerter les forces de sécurité.
Ce programme aurait permis, selon Thalès, de faire baisser la grande criminalité de 22% en trois ans dans cette agglomération célèbre pour sa violence.
Lundi et mardi, à Lyon, le 1er forum mondial des nouvelles technologies contre le crime, qui a pour ambition de devenir un «Davos de la sécurité», a mis en évidence «une course permanente à la
technologie», selon les mots employés par l'ancien juge antiterroriste français, Jean-Louis Bruguière.
«L'avantage est souvent aux malfaiteurs qui s'approprient facilement une
technologie», avant que les États ne s'en emparent, a-t-il expliqué au cours d'une table ronde d'experts de la police et de la justice.
Une idée partagée par le criminologue Alain Bauer qui a rappelé que «les narcotrafiquants colombiens avaient eu dans le passé un système d'écoutes plus élaboré que celui des autorités».
«Si les braquages de banques sont en baisse grâce au renforcement de la sécurité, aujourd'hui des braqueurs numériques vident des comptes» en se faufilant dans des failles de sécurité pour récupérer des données bancaires, a expliqué au cours du forum Myriam Quemener, procureur-adjoint au Tribunal de grande instance de Créteil, près de Paris, et spécialiste de la cybercriminalité.
Quant aux braqueurs à l'ancienne, ils se sont eux aussi mis à la page en utilisant des systèmes de brouillage de caméras.
«La
technologie, c'est en quelque sorte les deux faces d'une pièce : une opportunité qui peut être utilisée par les criminels mais aussi un moyen de les combattre», a dit en préambule de ce forum Ronald K. Noble, secrétaire général d'Interpol, en appelant les pouvoirs publics et les entreprises à unir leurs forces pour anticiper les besoins en sécurité.
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