L'organisme permanent, qui prendra la relève de l'escouade Marteau et de l'équipe de Jacques Duchesneau, sera nommé UPAC, pour Unité permanente anticorruption, a appris le Journal de sources bien informées.
L'escouade comptera des membres de la Sûreté du Québec, du Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP), de Revenu Québec, de la Commission de la construction du Québec, du ministère des Affaires municipales et des régions, du ministère des Transports ainsi que de la Régie du bâtiment.
L'UPAC sera dirigée par un commissaire à la lutte contre la corruption dont l'identité est gardée secrète pour le moment.
L'UPAC comptera 101 personnes déjà en poste dans divers ministères et organismes, en plus de 88 nouveaux effectifs, pour un total de 189 personnes.
Particulièrement, 31 procureurs en provenance du bureau du DPCP intégreront l'UPAC et seront exclusivement dédiés à ces dossiers.
Basé sur le modèle new-yorkais
Les personnes chargées des enquêtes se verront toutes octroyer le statut d'agents de la paix.
On pourra compter sur un budget de 31,5 M$ la première année, dont 15,9 M$ d'argent neuf.
La structure sera basée sur le modèle new-yorkais du Department of Investigation, comme l'avait évoqué le premier ministre Charest, en novembre dernier.
L'organisme aura un «mandat large» dans la lutte contre la corruption et la collusion et s'intéressera à l'octroi et l'administration des contrats publics, notamment dans l'industrie de la construction.
On opérera par le biais d'enquêtes criminelles et pénales, d'enquêtes fiscales et de vérifications administratives.
La principale différence avec l'escouade Marteau est son aspect permanent:
«Il faut arracher les mauvaises herbes à tous les jours si on veut que les bonnes poussent», avait illustré le ministre Dutil en entrevue au Soleil, en novembre.
L'obligation de discrétion levée
Le commissaire à la lutte contre la corruption devra rendre un rapport annuel et faire des recommandations au ministre de la Sécurité publique. De plus, on lui demandera de faire régulièrement des communications publiques.
Pour le bon fonctionnement de l'escouade permanente, on lèverait l'obligation de discrétion et de confidentialité des fonctionnaires, leur permettant ainsi de dénoncer des actes répréhensibles dont ils auraient connaissance.
De plus, on prévoirait des protections contre les représailles dont pourraient être victimes les dénonciateurs.
Par ailleurs, on envisage d'éliminer les obstacles existants aux transferts de renseignements relativement aux cas de corruption et de fraude contre l'État.
Aussi, il est question de hausser les pénalités pour les auteurs de fraudes fiscales d'envergure et de serrer la vis à ceux qui ne sont pas en règle avec le fisc.
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MONTRÉAL – Dotée de près de 200 membres et d'un budget de 31,5 millions $, l'Unité permanente anticorruption (UPAC), inspirée de celle de New York, a été lancée en grande pompe vendredi par Québec.
«Chaque matin, 189 personnes auront pour mandat de prévenir et de lutter contre le trafic d'influence, la corruption et la collusion par l'intermédiaire de mesures d'information, de vérification et de contrôle», a expliqué en point de presse le ministre de la Sécurité publique, Robert Dutil.«De plus, sur une base régulière, le commissaire à la lutte contre la corruption aura l'obligation de divulguer les modus operandi employés par les personnes et les entreprises malhonnêtes. Ainsi, nous aurons les stratagèmes à la télévision et les criminels en prison.»
Québec consacrera donc plus de 30 millions $ par année à cette unité qui relèvera directement du commissaire à la lutte contre la corruption.
L'identité de celui-ci n'est pas encore connue. Il sera nommé par un décret du Conseil des ministres pour une durée de cinq ans et relèvera directement du ministre de la Sécurité publique.
Selon Robert Dutil, le fait que le commissaire doit se rapporter à son ministère ne constituera pas une entrave à son indépendance.
«Il y a beaucoup de gens qui relèvent d’un ministère ou d’un gouvernement et qui sont indépendants. À New York, le commissaire est nommé par le maire, mais est parfaitement indépendant. C’est le même système ici. Le [directeur des poursuites criminelles et pénales] est nommé par le gouvernement et est indépendant du gouvernement», a fait valoir M. Dutil, visiblement agacé par les nombreuses questions des journalistes à ce sujet.
En place d’ici un an
Outre un commissaire à la lutte à la corruption, l’UPAC comprendra également un bureau de la lutte contre la corruption regroupant une vingtaine de procureurs.
L’unité comptera également des enquêteurs de la Commission de la construction du Québec et de la Régie du Bâtiment, ainsi qu’une équipe de vérification de la gestion contractuelle des municipalités, attachée au ministère des Affaires municipales. La Sûreté du Québec, l'escouade Marteau et Revenu Québec seront aussi représentés de cette structure.
Par ailleurs, le mandat de l’unité anticollusion sera élargi à tous les ministères du gouvernement, et ne concernera plus seulement celui des Transports.
Québec envisage aussi de donner le statut d’agent de la paix à certains membres de l’UPAC, par exemple des inspecteurs de Revenu Québec, afin de leur donner «davantage de pouvoirs» lors de leurs enquêtes.
Selon les estimations du gouvernement, le déploiement de l’UPAC sera complété d’ici an. Pendant ce temps, les différentes unités d’enquête, comme l’Opération Marteau, poursuivront leurs investigations.
Le ministre Dutil a également fait part vendredi de son intention d’adopter des mesures supplémentaires au cours des prochains mois, dont le Régime d’intégrité, qui lèvera l’obligation de discrétion des fonctionnaires pour qu’ils puissent signaler tout acte répréhensible dont ils seront témoin.
La réponse de Québec
L’UPAC devient la réponse du gouvernement aux demandes répétées de l’opposition qui réclame à hauts cris la mise en place d’une commission d’enquête publique sur les allégations de corruption et de collision touchant le domaine de la construction, a expliqué le ministre Dutil.
«On rejoint l’opposition qui dit que la population a le droit d’être informée. On arrive à une solution où les stratagèmes [d’entreprises malhonnêtes] seront [expliqués] à la télé, sans que ça nous empêche de mettre des criminels en prison, ce qui était le grand défaut de la formule proposée par l’opposition», a-t-il dit, en référence au fait que les témoignages entendus lors d’une enquête publique ne peuvent être utilisés en justice.
Le commissaire, qui sera nommé prochainement, devra par ailleurs fournir un rapport chaque année sur les actions de l’UPAC.
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