WASHINGTON - La liste des visiteurs de la Maison Blanche, les
risques de retard sur chaque vol intérieur américain, ou encore la
carte des tornades: ce sont quelques-uns des 400 000 fichiers publiés
sur
internet par l'Etat américain, un des précurseurs de l'«open data».
L'open data - littéralement «données ouvertes» en français -, qui vise à publier sur
internet le maximum de données publiques possible, a seulement quelques années d'existence.
Washington n'a lancé
data.gov
qu'en 2009, avec 57 fichiers, mais près de quatre ans plus tard, le
site publie régulièrement de nouvelles données, dans un format qui
permet aux entreprises ou aux citoyens de les exploiter facilement.
Le développement de l'
open data traduit la volonté des États d'améliorer la transparence de l'action publique et d'en justifier le coût auprès des citoyens.
C'est grâce à des données - gratuites - de l'administration des
transports, que des sites aériens américains indiquent pour chaque vol,
avant l'achat, le pourcentage de vols à l'heure: 73% seulement pour le
vol United Washington-New York du mercredi soir.
Et on trouve de tout sur data.gov: les rapports d'inspection des
maisons de retraite, les évaluations de sièges auto pour enfants ou les
taux d'infections nosocomiales dans les nombreux hôpitaux publics
militaires.
La qualité prime
Mais ce n'est pas tant le volume que la qualité des données qui importent.
Selon le professeur James Hendler, un expert américain qui étudie l'
open data
dans le monde, les Américains, suivis des Britanniques, sont en pointe
car ils ont institutionnalisé la publication des données par les
administrations. Ils ont aussi développé des «écosystèmes»
d'entreprises et d'associations qui exploitent les données dans des
applications pour les internautes.
«C'est bien de publier les données, mais tout est vraiment plus
utile quand on crée des communautés et si on donne l'opportunité aux
gens d'intégrer les données, et si les données sont lisibles par des
machines», explique-t-il.
Trous, erreurs et zones d'ombre
Mais si les Américains sont les premiers à s'être lancés, les zones
d'ombre persistent après une période d'euphorie suivant l'élection de
Barack Obama. Au premier jour de son premier mandat, le 21 janvier
2009, le président américain signait un mémorandum ordonnant à ses
ministères une «présomption de publication» pour tous les documents, un
renversement de tendance après la présidence de George W. Bush.
«Les deux premières années ont été très créatives, très avancées»,
explique Daniel Schuman, de la Fondation Sunlight. Mais «ils ont perdu
la motivation». En cause: l'inertie ou la résistance des
administrations, qui doivent adopter de nouveaux réflexes.
«Nous avons besoin de nouvelles lois, pour institutionnaliser cela
et nous immuniser contre un changement d'humeur du prochain président»,
expliquait récemment lors d'une conférence Anne Weismann, directrice
de l'ONG CREW, qui a forcé la Maison Blanche à publier la liste de ses
visiteurs, afin d'identifier ceux qui ont l'oreille de la présidence.
Des milliers de fichiers ne sont pas à jour, contiennent des trous
ou des erreurs, pointe de son côté Josh Tauberer, un jeune entrepreneur
de l'
open data, notamment sur le site des dépenses publiques (
USASpending.gov).
Mais l'
open data n'en est qu'à ses débuts. Avec plus de 40
pays et l'arrivée de l'Inde, l'Amérique du Sud et de dizaines de villes
dans le giron de l'
open data, le nombre de fichiers en ligne
pourrait passer d'environ un million actuellement à plus de cinq
millions d'ici 2015, selon James Hendler.
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