Comme s’ils n’en avaient pas déjà assez avec les multiples réformes scolaires et la lutte au décrochage, les directeurs d’école doivent de plus en plus traiter avec les parents-rois, cette nouvelle génération de pères et de mères qui tentent de faire la pluie et le beau temps dans le milieu scolaire de leur enfant.
Plaintes à répétition, crises de larmes ou de colère, menaces, les directeurs d’école peinent souvent à satisfaire aux demandes de ces parents exigeants.
«Les parents-rois existent au Québec, ça c’est clair. On est très exigeant avec l’école qui est devenue un substitut de la famille. Les parents ont tendance à oublier qu’il n’y a pas que leur enfant à l’école et que c’est une petite collectivité», témoigne Chantale Longpré, présidente de la Fédération québécoise des directions d’établissement d’enseignement (FQDE).
Selon cette dernière, qui a déjà été menacée physiquement par un parent insatisfait, l’horaire de l’école, la surveillance des élèves et la relation entre l’enseignant et l’enfant sont les sujets les plus souvent abordés par des parents insatisfaits.
«Des parents-rois qui se mêlent de tout, il y en a dans toutes les écoles. Le phénomène a toujours existé, mais c’est différent de nos jours, car le mandat de l’école a été élargi. Aujourd’hui, des enfants sont à l’école de 6 h le matin à 18 h le soir», avance-t-elle.
«Il entre à l’école en hurlant»
Une dizaine de témoignages troublants au sujet des parents-rois ont été recueillis, dont celui d’un directeur adjoint d’une école de la région métropolitaine qui a préféré taire son identité.
«Le phénomène est clairement en augmentation. L’éducation est maintenant une marchandise pour les parents qui achètent l’éducation de leur enfant et s’attendent à être traités en client», tranche-t-il.
Ce directeur adjoint a dû faire face à plusieurs parents difficiles, de la dame qui appelait à l’école trois fois par jour, à un père qui, insatisfait de la sanction imposée à son fils turbulent, est entré à l’école pour se plaindre en «hurlant et fessant sur les murs».
Un problème de communication?
Pour François Paquet, président de la Fédération des comités de parents, les parents sont tout simplement plus éduqués et renseignés qu’autrefois, d’où leur implication grandissante dans le réseau scolaire.
«Oui, ils sont plus exigeants, mais les écoles manquent aussi de transparence. La plupart des parents ne sont ni rois, ni agressifs, mais seulement renseignés. Tout repose sur la compréhension et la communication», affirme M. Paquet qui a lui-même été en conflit avec la direction d’école de son enfant «parce qu’il posait trop de questions».
Comme le résume Chantal Longré, «vaut mieux tout de même un parent plus difficile qu’un parent absent».
Parent-roi ou parent-poule?
Tout comme le phénomène des enfants-rois, celui des parents-rois est difficilement quantifiable. Il est néanmoins bien connu et commence à être sérieusement documenté, comme l’a confirmé la psychologue Catherine Cloutier.
Depuis douze ans, la psychologue Catherine Cloutier intervient auprès de familles et effectue aussi des expertises pour la DPJ. Des parents-rois, «qui refusent d’imposer des limites au comportement de leur enfant», ou des parents-poules, «qui surprotègent leur progéniture», elle en a vu souvent.
«Les deux sont de bonne foi et veulent simplement protéger leur enfant, les empêcher de vivre une situation difficile qu’ils ont parfois vécue eux-mêmes», analyse-t-elle.
Selon elle, un enseignant ou un directeur qui traite avec ce type de parent doit lui en parler, sans être trop confrontant, pour lui faire prendre conscience de son attitude.
«Ça se traite, autant du côté du parent que de l’enfant», assure-t-elle.
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