L'étude dite de Dunedin ou la plus longue étude sur le développement d'une population occidentale
Depuis les années '70 des scientifiques suivent le
développement d'un groupe de plus d'un millier de personnes nées dans la
région de Dunedin en Nouvelle-Zélande. Cette démarche longitudinale et
multidisciplinaire étudie l'évolution de la santé physique, psychique et
de la vie sociale de cette population depuis sa naissance. Elle éclaire
parfois d'un jour nouveau notre vision du développement humain.
Cette expérience a commencé en 1972 quand des médecins ont décidé
d'étudier les conséquences futures d'éventuelles complications à la
naissance sur des enfants nés à la maternité de Dunedin. C'est comme
cela qu'en 1975 les chercheurs ont fait une évaluation sur le
développement de 1037 enfants de 3 ans, soit la plupart des enfants nés à
Dunedin (+ de 90%) entre avril 1972 et mars 1973. Suite à cette
évaluation il a été décidé de les suivre tout au long de leur vie. Cette
étude réalisée par étapes dans le temps a donné lieu à de multiples
publications et à une série de films documentaires réalisées en 2015 par
Paul Casserly: "Qui sommes-nous? La grande expérience".
Cette expérience cherche donc à "comprendre ce qui fait de nous qui nous sommes".
Les scientifiques qui l'ont initiée ont mis en place pour cela une
méthodologie ambitieuse. Tout d'abord les personnes suivies le sont dans
la plus grande confidentialité quelle que soit leur situation. Ce qui
permettrait de créer une vraie confiance pour s'exprimer librement.
Les évaluations se sont faites de façon périodique entre 3 ans et
32 ans. La dernière a donc été réalisée en 2012, pour les 38 ans des
personnes suivis, et la prochaine aura lieu dès cette année à partir du
mois d'avril 2017.
À chaque étape de l'étude ils participent à Dunedin à des
entrevues, des tests, des examens médicaux et à des enquêtes où ils sont
évalués sur leur santé ainsi que sur leur vie personnelle et
professionnelle. Actuellement 96% des personnes, en vies, suivies depuis
leur naissance participent toujours à cette étude. Ce taux record de
suivi dans une étude longitudinale serait dû à la fois au cadre de
confiance et d'intérêt créé, mais aussi aux moyens financiers et humains
mobilisés pour l'étude. Les nombreuses personnes qui ne vivent plus sur
place (2/3) ont leur voyage et leur séjour pris en charge par l'étude
où qu'ils soient dans le monde. Les chercheurs et enquêteurs suivent
leur migration pour pouvoir rester en contact avec eux. Et si les
personnes ne peuvent pas venir à Dunedin ce sont eux qui se déplacent
pour les rencontrer.
Cette étude unique au monde a mis en avant de multiples éléments.
L'information la plus emblématique de cette enquête a remis sur la table
le débat entre l'inné et l'acquis chez l'Homme. Effectivement l'étude
démontrerait que le tempérament d'un enfant de 3 ans serait d'une façon
générale le même à l'âge adulte. Des éléments aussi importants et
déterminants pour l'avenir se jouant aussi jeune, les scientifiques
recommandent de miser sur les politiques publiques de la petite enfance
pour développer des parcours équilibrés. L'apprentissage de la maîtrise
de soi dès l'enfance serait la solution pour construire sa réussite
personnelle, professionnelle et une meilleure santé.
Lorsque les jeunes entrent en maternelle, ils ont donc déjà leurs
propres personnalités, classées en cinq types auxquels ils ne dérogeront
plus: les équilibrés, les réservés, les affirmés, les inhibés et les
indisciplinés. Aux trois premiers types, on promet santé, prospérité,
amour et bonheur, au contraire des 17 % d’inhibés et d’indisciplinés.
Colériques, asociaux, anxieux et toujours trop rigides, ils connaîtront
les maladies cardiaques, le chômage, la criminalité et les dépendances,
et bon nombre d’entre eux se retrouveront en prison, à moins qu’on
trouve un moyen de les encadrer dès l’apparition des premiers
«symptômes».
On a également établi que le nombre d’heures de sommeil influe
directement sur le poids et l’anxiété d’un individu, et que les enfants
qui «voient des choses» sont souvent à un stade précoce de
schizophrénie, ce qui a permis aux médecins d’adopter une nouvelle
approche concernant la détection de la maladie.La Schizophrénie et la psychose, commence a se développer surtout vers l'âge de 11 ans, à cause de problêmes de vascularisation sanguine au cerveau.
L'étude analyse aussi les causes de la délinquance juvénile,
l'impacte de la télévision sur les résultats scolaires, le manque de
sommeil sur l'obésité et bien d'autres choses. Mais l'étude de Dunedin,
comme beaucoup d'études, soulève des controverses et particulièrement
quand cette recherche révèle que les violences conjugales seraient dues
tout autant à l'homme qu'à la femme. La différence d'impact se porterait
sur les différentes constitutions des deux sexes.
Il s’agit de l’une des plus importantes études jamais effectuées sur les
liens entre le mauvais traitement pendant la petite enfance et la santé
à l’âge adulte. L’étude a révélé que des expériences négatives pendant
la petite enfance, incluant la violence faite aux enfants et le
dysfonctionnement familial, sont statistiquement liées à une plus grande
incidence de problèmes de santé mentale, d’accoutumance, d’obésité, de
diabète de type 2, d’hypertension artérielle et de coronaropathie à
l’adolescence et à l’âge adulte.
En plus de découvrir que la durée de la période passée en orphelinat est
liée à un quotient intellectuel (QI) plus faible et à des problèmes de
comportement, les chercheurs ont signalé que l’adversité en début de vie
touchait les chromosomes des enfants et entraînait le vieillissement
rapide de leurs cellules et augmentait probablement le risque de
souffrir du cancer et de maladies du coeur à l’âge adulte.
Les données longitudinales représentent un outil scientifique comportant
des marqueurs génétiques et environnementaux qui prédisent des troubles
de l’humeur, des comportements antisociaux et criminels, de la psychose
et de la toxicomanie à long terme.
La manière dont s’exprime le gène de la monoamine-oxydase (MAO) a une influence sur
le taux d’enzyme et les processus biologiques. Les hommes qui ont été
maltraités pendant l’enfance sont plus susceptibles d’être antisociaux
si l’activité de la MAO est faible. Toutefois, les hommes dont
l’activité de la MAO est faible mais qui n’ont pas été maltraités et les
hommes dont l’activité de la MAO est élevée mais qui ont été maltraités
ne sont pas devenus plus antisociaux.Les gens demandent souvent si nous naissons mauvais ou si nous le devenons. Aucun des deux « , résume-t-il. C’est une combinaison d’un gène et d’une expérience vécue.
L’étude longitudinale de Dunedin a également révélé que les
individus
ayant un gène de petite taille ou un allèle participant à la production
de sérotonine étaient plus susceptibles d’être dépressifs ou
suicidaires s’ils devaient faire face à l’adversité en début de vie. Les
autres individus faisant face aux mêmes types d’adversité, mais
qui
possédaient deux longs allèles ou types de gène, étaient résilients et
moins susceptibles d’être dépressifs.
Fumer du cannabis régulièrement à l'adolescence peut provoquer une
baisse des capacités intellectuelles à l'âge adulte, montre une étude
publiée lundi par une revue scientifique américaine.
Malgré des controverses cette recherche est devenue une référence
mondiale. Elle aurait même participé à la lutte pour l'abolition de la
peine de mort des mineurs aux États-Unis. Alors demain peut-être la
politique de la petite enfance deviendra la grande priorité dans les
programmes politiques ainsi que dans les actions des gouvernements. Savoir contrôler ses émotions, comme sa colère, permet de persévérer
dans l’adversité. C’est l’une des compétences les plus importantes dans
la vie « , explique Richie Poulton. Or, le self-control peut
s’apprendre dans la petite enfance, notamment à travers des jeux. C’est
aux premières années de la vie, quand le cerveau est le plus malléable,
qu’il faudrait consacrer l’argent public » afin d’avoir le meilleur retour sur investissement « , plaident les chercheurs de Dunedin.
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