Trois Montréalais ont finalement été épinglés vendredi par
la Sûreté du Québec pour un vol massif de données personnelles et de
fraudes aux dépens de milliers d’enseignants à travers la province.
La présumée tête dirigeante de cette affaire, Rath Pak, 41 ans,
ainsi que Frédéric Lapointe, 41 ans, et Jimmy Saintelien, 39 ans, ont
été libéré sous promesse de comparaître, après avoir été arrêtés en
matinée par la Sûreté du Québec (SQ).
Le trio devrait être accusé à une date ultérieure d’avoir orchestré
un stratagème de vol d’identités et de fraudes qui a possiblement mis à
risque les données personnelles de la majorité des enseignants et
ex-enseignants de la province, soit plus de 360 000 personnes.
« L’un d’eux a été arrêté une première fois en février 2019. Les
deux autres avaient été rencontrés. Il n’y avait pas eu d’accusations à
l’époque », a précisé vendredi le sergent de la SQ Louis-Philippe
Bibeau, pour justifier cette deuxième frappe.
Au printemps 2018, les suspects, qui faisaient partie d’une
« petite structure » organisée, auraient profité d’une brèche
informatique pour subtiliser ces données.
Avec celles-ci, ils auraient créé de faux permis de conduire et
falsifié des cartes d’assurance maladie pour obtenir des cartes de
crédit, notamment.
Puis, une « anomalie de connexion » aurait vendu la mèche des malfaiteurs.
L’enquête, baptisée « Précieux », avait ensuite mené à cinq saisies
lors desquelles avait été trouvée une clé USB contenant les numéros
d’assu-rance sociale, noms, prénoms et dates de naissance de 51 400
profs.
Encore des risques
Plus récemment, Le Journal rapportait que certains avaient
été victimes de demandes de PCU à leur nom. Ces cas laissent présager
que leurs infos pourraient avoir circulé sur le dark web.
« Avec les vols de données chez Desjardins et Capital One, je ne
sais même pas quelle est la [vraie] cause, se désole Martin Guay, un
enseignant de Rouyn-Noranda dont l’identité a été usurpée. Mais je suis
content de voir qu’il y a un aboutissement avec des arrestations. »
Ce coup de filet s’avère une « bonne nouvelle » pour d’autres
victimes également, sans toutefois les rassurer quant aux possibles
conséquences futures.
« J’ai juste abandonné, dit de son côté un prof qui a préféré
rester anonyme. Je suis sûr que mes données circulent partout. Et notre
employeur n’a pas bien géré la situation. Il a mis du temps à
reconnaître que nos données avaient été mises à risque. Je trouve qu’il
l’a échappé. »
« Comment peut-on être dédommagés ? Ma cote de crédit est affectée.
Je paie trop d’intérêts sur mon hypothèque, déplore François Charland,
35 ans, père de famille et enseignant en mathématiques à Québec. En fin
de compte, les banques sont contentes. Elles ont touché l’argent et les
intérêts, et c’est nous qui absorbons. C’est ce que je trouve le plus
aberrant. »
- Avec Axel Marchand-Lamothe et Arnaud Koenig-Soutière