Pétrole : les découvertes au plus bas depuis trente ans:
Les volumes d'hydrocarbures découverts ont chuté de 13 % en 2017 pour atteindre un plus bas depuis les années quatre-vingt-dix. Les dépenses d'exploration des compagnies ont chuté de 60 % en trois ans.
Les découvertes des compagnies
pétrolières se réduisent comme peau de chagrin. Seuls 11 milliards de
barils équivalent pétrole d'hydrocarbures ont été découverts en 2017,
soit 13 % de moins que l'année précédente, selon une estimation de l'IFP
Energies nouvelles (IFPEN). Jamais un volume aussi faible n'avait été
enregistré depuis les années 1990.
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La
principale raison, mais ce n'est pas la seule, c'est que les compagnies
n'en finissent pas de réduire leurs dépenses d'exploration. Le budget
qu'elles y consacrent a encore reculé de 10 % l'an dernier, à
41 milliards de dollars. Soit un plus bas depuis au moins dix ans. Par
rapport au pic à 100 milliards atteint en 2014, lorsque le prix du baril
dépassait les 100 dollars, les efforts dédiés à la recherche de
nouveaux champs ont chuté de 60 %.
Avec le schiste, pas besoin d'explorer
Qu'elles
soient nationales ou privées, toutes les sociétés du secteur ont réduit
leurs investissements de façon draconienne ces dernières années pour
faire face à la chute des cours du brut qui amputait leurs bénéfices. Les investissements dans leur ensemble ont légèrement rebondi l'an dernier (+4 %), mais pas dans l'exploration, où le reflux s'est poursuivi.
Plutôt
que d'investir dans l'exploration, toujours risquée financièrement,
beaucoup de compagnies ont pu augmenter leur production grâce au boom du
schiste aux Etats-Unis. « Pour le schiste, pas besoin d'explorer, il suffit de forer ! »,
observe Sylvain Serbutoviez, auteur de l'étude à l'IFPEN. D'autres ont
préféré faire des acquisitions pour augmenter leurs réserves en
profitant de la faible valorisation des groupes pétroliers. C'est le cas
de Total qui a repris le danois Maersk Oil l'an dernier .
Découvertes de plus en plus petites
Le
tour de vis budgétaire des compagnies pétrolières n'explique pas tout,
car le reflux des découvertes d'hydrocarbures a démarré dès 2011, bien
avant le recul des dépenses d'exploration. Et le nombre de champs
repérés s'établit toujours autour de 200 par an, comme les années
précédentes.
Les tensions commerciales font chuter les cours
Les
cours du pétrole ont lourdement chuté mercredi sur le marché
new-yorkais Nymex, le Brent lâchant quasiment 7 %, sa plus forte baisse
en une journée depuis près de deux ans et demi, avec l'aggravation des
tensions commerciales entre les Etats-Unis et la Chine.
Les
Etats-Unis ont publié mardi soir une liste de produits chinois
représentant 200 milliards de dollars (171 milliards d'euros)
d'importations américaines que Washington pourrait taxer à 10 % dans
deux mois en l'absence d'accord avec Pékin.
Ce
qui est nouveau, c'est que la taille des découvertes est de plus en
plus petite. Le temps des découvertes de champs géants au large du
Brésil (à partir de 2006) ou bien au Mozambique et en Tanzanie (en 2010)
est révolu. L'an dernier, la plus importante a été réalisée par le
britannique BP, par plus de 2.000 mètres de fond dans les eaux
sénégalaises. Il s'agit du champ gazier de Yakaar, dont les capacités
sont estimées à 2,6 milliards de barils équivalent pétrole. « Les zones explorées sont de plus en plus profondes et complexes d'un point de vue géologique », explique l'IFPEN.
Un demi-siècle de réserves
Avec un peu de recul, la chute des découvertes est à relativiser : « Les réserves prouvées mondiales de pétrole ont augmenté de 23 % en dix ans », rappelle l'IFPEN. Elles représentent 52 années de production.
Il
n'empêche, au rythme actuel, les découvertes seront largement
insuffisantes pour compenser le recul « naturel » de la production, qui
est de 3,5 % par an en moyenne dans les champs pétroliers et gaziers en
exploitation. Certains tirent la sonnette d'alarme. Le patron de Saudi
Aramco, Amin Nasser, estime que le boom du schiste américain ne suffira
pas sur le long terme. Les compagnies ont réduit leurs investissements
avant tout pour « répondre aux attentes de leurs actionnaires », a critiqué le directeur général de la compagnie nationale saoudienne dans une interview au « Financial Times », cette semaine.
Remontée attendue
L'année dernière a probablement marqué un point bas. En 2018, les prix des services ont augmenté. « C'est le signe que l'activité commence à remonter »,
estime Sylvain Serbutoviez. Et la hausse des cours - le baril de brent
frôle les 80 dollars -, pourrait inciter les compagnies à relâcher un
peu la bride sur leurs investissements.
Vincent Collen
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